Bhopal n'est pas seulement l'un des plus marquants et dramatiques accidents industriels jamais survenus, c'est aussi l'histoire d'un scandale. En décembre 2004, un article dans le Monde diplomatique était titré : «Bhopal, l'infinie catastrophe. Vivre et mourir avec le risque industriel ». Cet article résume brièvement l'événement survenu en 1984, les luttes juridiques engagées depuis et les suites de ce dossier sur lequel les ONG réclament la reconnaissance d'un « passif environnemental » qui a fait trembler bien des entreprises.
C'est dans la nuit du 2 au 3 décembre 1984 que survint l'accident de Bhopal, en Inde. L'usine filiale d'Union Carbide, multinationale américaine, explosa en libérant un nuage extrêmement toxique. Le bilan dramatique fut de plusieurs milliers de mort et de plus de 300 000 malades, dont beaucoup, handicapés à vie. Le gaz libéré par l'usine où étaient fabriqués deux pesticides s’est révélé être de l’isocyanate de méthyle, très proche du fameux gaz moutarde
À ce drame écologique et humain, a succédé une bataille juridique qui a abouti à l'impunité de la maison-mère américaine face à la justice indienne. Ce scandale a été largement commenté, d'autant plus que beaucoup savaient la catastrophe prévisible. En effet, suite à un plan d'économies drastiques, tous les systèmes de sécurité étaient soit défaillants, soit en réparation. Les employés chargés de la surveillance étaient tellement habitués à voir les aiguilles des manomètres s'affoler sans raison qu'ils ne sont même pas intervenus.
En 1989, Union Carbide a versé 470 millions de dollars à l'État indien pour dédommager les victimes. Celles-ci ont touché, en moyenne, 25 000 roupies soit 715 €. Pourtant les observateurs estiment que l'État a bâclé son travail. Les responsabilités pénales de la multinationale et de ses dirigeants sont passées à la trappe en échange d'une indemnisation près de six fois inférieure aux 3 milliards de dollars initialement demandés. L'un des effets pervers a été un véritable commerce de documents falsifiés permettant à des malades n’ayant peut-être rien à voir avec l'explosion d'être indemnisés ou pris en charge.
L'histoire aurait pu s'arrêter là... En 1999, Dow Chemical rachète Union Carbide pour 9,3 milliards de dollars. Dow refuse d'accepter toute responsabilité morale et les tribunaux américains continuent d'étudier sa responsabilité légale.
Les habitants poursuivent la lutte, d'abord, parce qu'une deuxième génération de victimes naît et, ensuite, parce que les sols ont été empoisonnés, indépendamment de la catastrophe, du fait de l'activité quotidienne de l'usine. Depuis l'avènement du nouveau millénaire, deux axes de travail se sont ouverts : celui de l'eau et celui de la dépollution des sols.
Les experts ont estimé que 20 000 personnes étaient exposées à l'eau empoisonnée. Le 7 mai 2004, la Cour Suprême 800 000 litres
Plus de 20 ans après la catastrophe, la dépollution des sols s'avère extrêmement délicate et l'État indien reconnaît ne pas disposer des technologies nécessaires.
Les développements judiciaires de cette affaire ne sont donc pas terminés. Pourtant, en novembre 2000, le nouveau président de DOW, Michael D. Parker a déclaré : « nous sommes extrêmement conscients de Bhopal et le fait que cet incident est associé à Union Carbide, mais Union Carbide a fait tout ce qu'elle devait pour appliquer des programmes environnementaux, sanitaires et de sécurité corrects. » Reconnaître un tel « passif environnemental » équivaudrait à provisionner des milliards d'euros pour la dépollution.
Ce nouveau type de passif ne concerne pas que les catastrophes, il concerne tout site susceptible de présenter un risque industriel. En France, le cas de la faillite du métallurgiste Metaleurop a défrayé la chronique en laissant derrière lui des hectares souillés contraignant l’Etat et les collectivités à dépenser des millions d'euros pour réhabiliter le site.
Ce type de catastrophe environnemental et sanitaire a été traité dans le cinéma Hollywoodien avec des films comme Erin Brockovich (lire l'article).
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